Samedi 22 août: sur le pont d'Avignon, on y roule tous en rond…Rendez-vous était donné par Abeillaud à Avignon devant le Palais des Papes.
Arrivé à 13h00 à Avignon-TGV, je rejoins le centre-ville par les pistes cyclables à la rencontre de Miss Kat et de Marie-Agnès arrivées sur place avec les 2 précédents TGV. Les vacances commencent bien: 2 mauvaises chutes au centre-ville (la 1ère, c'est le vélo qui tombe, la 2ème c'est le pilote qui se casse la figure) ont faillis me gâcher cette sortie que j'attendais avec impatience et réduire à néant ma participation en déclarant forfait. Fort heureusement, rien de grave. Jumpy est robuste et je m'en tire pour ma part avec des égratignures à l'avant bras gauche, des douleurs au bras qu'il me faudra accepter pendant au moins 2 jours ainsi que des éraflures au genou gauche. En cause, le T-Bag chargé à bloc. Avec toutes les affaires à emmener pour cette semaine, je n'ai pas réussi à fermer le sac et le levier de frein est venu se coincer dans l'ouverture au détour d'un virage, m'empêchant de tourner le guidon. La suite est facile à comprendre: perte d'équilibre et chute avec les pédales automatiques. Fort heureusement, la chute s'est produite à très faible vitesse. Le T-Bag a encaissé le choc pour moitié et mon bras pour l'autre moitié.
Après avoir retrouvé tous les membres de l'équipe, nous traversons Avignon et décidons de nous restaurer. Nous aurons l'occasion de croiser 4 Brompton: un couple de Hollandais et 2 Anglaises avec qui nous avons conversé. Nous prenons en début de soirée le TER pour le camping de la Sorguette à l'Isle-sur-la-Sorgue qui constituera notre QG pour la semaine à partir duquel nous effectuerons toutes nos excursions. Miss Kat avait fait le nécessaire sur la base des recommandations d'Abeillaud en nous réservant un Mobil-Home de luxe 4 étoiles avec tous le confort nécessaire pour 4 personnes. Abeillaud doit encore monter sa transmission sur son Brecki et profite d'être descendu du train pour installer la chaîne et la courroie afin de pouvoir se rendre de manière autonome au camping situé à 2 km de la gare sans pousser le vélo. Arrivée tardivement au camping, nous prenons nos marques et nous installons.
J'ai effectué au cours de cette seule journée une trentaine de kilomètres.
Dimanche 23 août: rendez-vous avec l'histoireAbeillaud savait que l'équipe de vélocipèdes chargée de commémorer les 150 ans du 1er grand voyage au monde en 2 roues entre Paris et Avignon était dans le secteur et terminait leur voyage aux portes d'Avignon.
Le lieu et la date collaient parfaitement, une occasion unique à ne pas rater.
En effet, partis de Paris vers le 25 août 1865, les frères Olivier rejoindront depuis la région parisienne la maison familiale du Pontet aux portes d’Avignon en 8 jours à l’aide de ce moyen de locomotion qui venait de naître, le vélocipède, dans le but d'en faire la promotion.
C’est ce voyage de 864 km qu'a voulu rééditer l'équipe de 7 vélocipédistes à l’occasion de ce 150ème anniversaire avec d’authentiques vélocipèdes de cette période en hommage à ces pionniers du cyclotourisme qui furent par la suite les plus grands artisans du développement du vélocipède et de la vélocipédie en France.
Nous avons vécu ce jour là un très grand moment de l'histoire du vélo.
Nous partons de bonne heure de notre QG pour aller à leur rencontre du côté de Piolenc au Nord d'Orange.
Signe du destin, nous arriverons quasiment au même moment qu'eux et au même endroit sur la place centrale de Piolenc.
Nous nous restaurerons avec les participants de ce voyage venus nombreux à l'espace Acampado et profitons de ce moment privilégié pour discuter avec l'équipe internationale composée d'un Américain
, d'un Anglais
, d'un Canadien
, d'un Franco-Japonais
et de 3 Français
dont un Franco-Allemand
Nous avons pour certains pu rencontrer pour la 1ère fois Goody-Guy, le co-fondateur et administrateur du Bromptonforum avec Frédo qui était l'un des organisateur de cette commémoration
Shohreh et Miss Kat les avait rencontré à Montargis le dimanche 9 août peu après leur départ de Paris.
Nous poursuivrons notre circuit en les accompagnant.
J'ai même eu le privilège de pousser Stuart MASSON-ELLIOTT, le vélocipédiste anglais dans la dernière montée peu avant Châteauneuf-du-Pape. La fatigue des derniers jours, la difficulté de rouler sur ce type de vélo, la chaleur et la montée avant le village ont eu raison des ses forces et l'Anglais m'a demandé de l'aide que j'ai accepté sans réserve.
Les 1ères gouttes de pluie commenceront à tomber vers 15h30 après Châteauneuf-du-Pape. D'abord quelques gouttes, puis le déluge peu avant Sorgues
L'équipe des vélocipèdes se change pour porter les tenues d'apparat afin d'arriver au Pontet terminus de leur long périple en costume d'époque comme leurs prédécesseurs 150 ans plus tôt. Nous nous arrêterons au rond-point de la rue des tonneliers sur la D907 au Pontet où l'équipe municipale de la ville les attend. Sur ce rond-point trône une réplique de l'un des vélocipèdes utilisé en 1865 avec une plaque de ce fameux voyage effectué il y a 150 ans. L'équipe municipale a dévoilé à cette occasion une plaque commémorative à l'attention de cette équipe qui a réédité l'exploit ce dimanche 23 août 2015. Nous arriverons à la Mairie du Pontet tremper comme des soupes content de prendre un petit encas et se sécher un minimum.
Ces vélos ont malgré leur très grand âge réussi un pari un peu fou d'emmener leur pilote jusqu'aux portes d'Avignon. Ils ont roulé sur plus de 860 km, ce qui est un exploit pour des vélos de plus de 150 ans. Goody-Guy a d'ailleurs effectué une étape sur l'un des vélocipèdes. Le trajet ne s'est pas fait sans mal et plusieurs pannes ont été recensées. Fort heureusement, l'équipe d'assistance était là pour leur porter secours. Nous avons d'ailleurs assister à Piolenc à une séance de réparation de fortune, ces vélos d'une autre époque n'étant pas simple à réparer. Il faut huiler et graisser chaque jour les moyeux, changer les bandages qui ont déjantés (et c'est loin d'être simple, plus dur que de changer un Marathon+ sur un Brompton), réparer les freins qui ont laché….
Nous repartons sous le déluge vers la gare de Montfavet pour prendre le dernier TER vers l'Isle-sur-la-Sorgue.
Nous aurons effectué une soixantaine de kilomètre ce jour là.
Lundi 24 août: à travers la CamargueLa veille, nous analysons avec Olivier et Valère les possibilités qui nous sont offertes pour élaborer le programme de cette journée, les conditions météos étant relativement mauvaises sur la région, particulièrement à l'Est et au Nord du Luberon où Abeillaud avait projeté initialement d'aller faire un tour.
C'est la raison qui nous a poussé à fixer l'ascension du mont Ventoux le mardi, la météo redevenant clémente à partir de cette date et tout le reste de la semaine. Pour la journée du lundi, seule une éclaircie se profile l'après-midi sur le sud d'Avignon d'après le site de Météo France. C'est sur la Camargue que nous jetons finalement notre dévolu pour éviter de rouler sous la pluie, l'expérience de la veille ayant refroidit nos ardeurs et notre enthousiasme (les vêtements de la vielle n'ayant pas totalement séchés).
Nous quittons notre campement très tôt pour prendre le train en direction d'Arles sous un ciel gris et menaçant. Arrivé en gare d'Avignon, le déluge s'abat comme la veille. Fort heureusement, nous sommes en train. Nous décidons à Arles d'attendre en gare la fin du déluge avant de repartir, une fenêtre météo se profilant vers 11h00 d'après les derniers relevés de Météo France. Deux Bromptonistes américains à la retraite et en vacances dans cette région font leur apparition vers 10h15 dans le hall de la gare stupéfaient de rencontrer autant de Brompton à cet endroit. Nous conversons avec eux durant près de 45 min. J'en profite à leur demande pour effectuer une réparation sur leur vélo. Ce n'est finalement que vers 11h00 que le soleil fait enfin son apparition et nous décidons de prendre la route. Nous visiterons le centre historique d'Arles avec les arènes et l'amphithéâtre."
Abeillaud en profite pour prendre des informations à l'office du tourisme et s'acheter un superbe chapeau
Nous effectuons quelques emplettes pour la journée et continuons notre périple en direction de Saint-Gilles par les petites routes à travers le parc naturel régional de Camargue.
Le paysage est superbe avec des rizières (peu de gens savent qu'on cultive le riz en Camargue depuis la fin du 16ème siècle), de vastes champs, des espaces réservés aux chevaux, des étendus de roseaux, des canaux d'irrigation et une vaste biodiversité.
Les rizières sont stupéfiantes, car on imagine pas un seul instant cultiver le riz en France alors que la production mondiale est implantée en Asie.
Après une pause sur le quai du port de plaisance de Saint-Gilles pour casse crouter, nous reprenons la route vers le littoral.
Nous nous arrêterons quelques instant au centre équestre Paul Ricard avant de repartir sur Arles pour boucler notre tour.
Arrivé trop tard à Avignon pour prendre le train en direction de l'Isle-sur-la-Sorgue, nous sommes obligés de rentrer en vélo. 25 km supplémentaires et 1h30 de trajet environ le long de la D901 avec l'ascension du massif entre Morières-les-Avignon et Châteauneuf-de-Gadagne qui culmine à 110 m d'altitude.
Nous arriverons au camping de nuit à la lueur de nos lampes.
Nous avons effectués 95,74 km durant cette seule journée.
Vitesse moyenne: 15,33 km/h, temps de parcours: 6 heures et 14 minutes, vitesse max: 40,60 km/h
Mardi 25 août: la difficile ascension du mont VentouxNous profitons d'une fenêtre météo favorable pour faire l'ascension le mardi 25 août.
Avec Abeillaud, nous élaborons la veille du départ le plan d'attaque pour vaincre le sommet. L'accès au mont Ventoux peut se faire par 4 routes:
- La route de Malaucène qui constitue la route la plus spectaculaire
- La route de Bédoin qui constitue la route mythique du tour de France et l'une des plus difficiles
- La route de Sault qui est l'itinéraire le plus facile
- La route forestière qui est la plus mauvaise de toutes.
Nous abandonnons rapidement l'idée de la route forestière en raison du mauvais état du revêtement. Nous évacuons également l'idée de faire l'ascension depuis Sault qui constitue l'itinéraire le plus facile de tous, Sault étant à 700 m.
Finalement, nous décidons de gravir le sommet par Bédoin dont le parcours est jalonné de bornes kilométriques croissantes indiquant le kilométrage restant jusqu'au sommet, la pente et l'altitude, le kilomètre 0 étant situé à Bédoin.
Un autre avantage de cet itinéraire est l'accès par train jusqu'à Carpentras depuis Avignon qui nous permet d'arriver suffisamment tôt au pied du massif du Ventoux.
Abeillaud évalue qu'il faille environ 5 heures pour réaliser l'ascension et élaborons le timing théorique en fonction des horaires de train.
Nous partons de bonne heure en train direction Carpentras.
Fort heureusement, la ligne Avignon-Carpentras a réouverte en avril 2015 au service voyageur et c'est sur une ligne toute neuve que nous arrivons au terminus de Carpentras qui constituera le début de notre ascension du Ventoux.
Abeillaud nous a fait une surprise en étant habillé avec un costume d'époque et son superbe chapeau pour cette journée particulière
Nous commençons en gare de Carpentras par une séance de 30 minutes de mécanique pour changer le plateau du Brompton de Marie-Agnès et effectuer divers réglages.
Après nous être délesté de toutes les affaires jugées inutiles pour l'ascension afin de nous alléger au maximum en prévision des dures difficultés qui nous attendent (affaires confiées à Pouille venu en voiture), nous filons vers le centre ville pour acheter le ravitaillement qui sera nécessaire: 4 pack de 6 bouteilles d'eau (soit 4 L par personne), de l'alimentaire, sans oublier le saucisson et du brut pour la victoire.
La mécanique et ces courses nous ferons perdre un temps précieux, mais nous ne pouvons faire l'impasse sous peine d'abandon.
Nous prenons réellement la route pour Bédoin vers 11h30.
Arrivée à Bédoin, nous devons nous arrêter chez un vélociste pour changer les pédales du Brecki d'Abeillaud, celles en place ne lui permettant pas de rouler confortablement. Olivier arrivera péniblement à trouver une paire de pédales plates de BMX pour l'ascension (les vélocistes ne vendent quasiment que du haut de gamme).
Nous nous arrêterons peu après Bédoin vers 13h30 pour casse croûter et reprendre des forces avant la difficile ascension qui démarre véritablement à cet endroit.
Nous refaisons une nouvelle fois les pleins des bidons en prévision des difficultés à venir.
De Bedoin à Saint-Estève, la rampe s'accentue et frôle les 5,5%. Il s'agit d'un avant goût de ce qui nous attend.
L'épingle à cheveux à Saint-Estève marque le vrai départ de la longue rampe ininterrompue vers le sommet à travers la forêt, la route grimpant verticalement la paroi.
De Saint-Estève au Chalet Reynard, je n'ai plus quitté la 1ère vitesse (développement de 1,87 m), la pente en moyenne de 10% ne descendra plus en dessous des 9% et atteindra même sur un tronçon d'environ 500 m les 12%. J'ai du gérer mon effort de manière à ne pas dépasser les 160 pulsations par minute. J'ai du faire attention à ne pas descendre en dessous des 3 km/h pour éviter de décrocher et tomber, ma vitesse maximale plafonnant à 6 km/h dans les rares tronçons à 9%. Nous avons du être également très vigilant avec la circulation automobile (motos et voitures), la route n'étant pas large.
La rudesse de la pente et la longueur de mon développement mini m'obligeront à faire des arrêts fréquents pour reprendre mon souffle, m'hydrater, éliminer et reprendre à intervalles réguliers de l'énergie. C'est l'endroit où j'ai consommé le plus d'eau et manger le plus de barres énergétiques.
Nous sommes dépassés régulièrement par des coureurs cyclistes aguerris équipés de ce qui se fait de mieux sur le marché.
Peu importe, nous fronçons les sourcils, accentuons le souffle, appuyons fortement sur les pédales, prenons notre courage à 2 mains et continuons notre route vers le sommet.
De Saint-Estève jusqu'au chalet Reynard, nous profitons de l'ombre et de la fraîcheur apportée par les arbres et la forêt. Revers de la médaille, nous n'avons aucun point de repère auquel nous accrocher, les virages et lignes droites en pente de 9% se succédant de manière interminable sans fin.
Dans la montée, nous croiserons 2 Scorpions (vélos couchés) qui dévalent la pente à près de 100 km/h (leur pilote ont même pédalé pour accélérer davantage).
Ce n'est qu'à 1400 m d'altitude que la forêt s'entrouvre enfin et laisse deviner le chalet Reynard, point de bifurcation des routes de Bédoin et de Sault ou nous arrêtons pour marquer une pause, nous hydrater et attendre Abeillaud qui grimpe tranquillement à son rythme (mais sûrement) avec son Brecki.
Nous reprenons la route pour le sommet vers 17h30 de manière dispersé avec Walmus, Gabrielle, Miss Kat et Valère en tête suivis quelques minutes plus tard de Macadam, Marie-Agnès et Abeillaud qui ferment la marche. Pouille et son épouse suivent à faible vitesse avec leur voiture le groupe pour apporter l'assistance en cas de nécessité et assurer les missions de presse (photos, vidéos).
Cette fois-ci le sommet est en vue à plus de 7 km. Plus l'altitude augmente, plus le paysage devient aride et lunaire. Nous sommes cette fois-ci davantage exposés au soleil et au vent. Les deux premiers kilomètres sont modérés avec une pente de seulement 6 à 7% qui nous permet de progresser plus rapidement et de reposer un peu les jambes en moulinant. C'est la seule fois que j'ai pu passer la 2ème vitesse.
A 4 km du sommet, le vent du Nord commence à se lever et je suis obligé de repasser en 1ère vitesse. A 2 km du sommet, la pente se durcit à nouveau avec un taux de 9%. A 1 km du col des Tempêtes, le vent de face est terrible et souffle en rafales continues et la température chute. Nous devons nous couvrir pour nous protéger de ce nouvel adversaire.
La mécanique tient le coup malgré les efforts, le vent et la rudesse de la pente.
Ce n'est que lorsque la route fait des boucles en direction de l'Ouest contre le sommet que nous pouvons nous protéger de ce terrible vent.
Nous arrivons au sommet en ordre dispersé chacun à notre rythme: les premiers partis du chalet Reynard arrivant un peu avant 19h00 au sommet, les derniers vers 19h10.
Nous sommes fiers de ce que nous avons accompli ce jour là
Nous sommes plusieurs à avoir réalisé un véritable exploit en montant au sommet du Ventoux en Brompton, même si nous ne sommes pas les premiers à l'avoir fait.
Il est dommage que nos prédécesseurs qui ont fait le Ventoux en Brompton n'aient pas pu se joindre à nous pour commémorer cet exploit et partager ce moment de bonheur.
Malgré la fatigue et la souffrance endurées durant l'ascension, toute l'équipe posera fièrement devant le panneau "Mont Ventoux 1911 m".
Abeillaud ouvrira une bouteille de brut pour fêter cet événement comme il se doit.
Nous devons cependant pas traîner, car il est déjà presque 19h30 et la nuit commence à tomber alors que nous sommes encore au sommet.
Nous ne pourrons malheureusement pas profiter plus longuement du paysage qui nous est offert et savourer notre victoire sur ce géant.
Nous nous équipons pour la descente qui s'apprête à être longue et délicate en raison de la lumière qui décline, de la pente et du vent.
La descente se fera par la route de Malaucène qui est la plus spectaculaire pour accéder au Ventoux.
Pouille récupère tous nos bagages de manière à être le moins vulnérable face au vent qui souffle fort et qui peut nous déstabiliser dans la descente, du moins sur les 3 premiers kilomètres, le temps d'atteindre à nouveau la forêt.
Nous nous répartissons les rôles de manière à ne perdre personne et nous attendre mutuellement à des endroits réguliers pour reformer le groupe et laisser refroidir les jantes. J'ouvre la marche tandis que Walmus reste en queue de convoi pour fermer la marche.
Je savoure cette longue descente en tête du convoi.
C'est la 1ère fois que réalise une si longue descente au coucher du soleil
Le paysage sur les 3 premiers kilomètres est somptueux et de toute beauté avec les chaînes montagneuses du Vaucluse. Nous savourons ces instants magiques à chaque arrêt.
Dans les deux premiers lacets, j'augmente progressivement ma vitesse de pointe à l'affut du moindre bruit suspect ou vibration anormale qui serait le signe d'un problème mécanique en me fixant une première vitesse limite de 50 km/h de manière à voir comment le vélo se comporte dans la descente et pouvoir m'arrêter rapidement en cas de nécessité. Jumpy ne bronche pas.
A chaque arrêt pour recomposer le groupe et laisser refroidir les jantes, j'inspecte rapidement le vélo (freins, charnières, roues, guidon). Tout est normal.
Après chaque virage, j'augmente encore un peu plus ma vitesse max par palier de 5 km/h jusqu'à atteindre la vitesse limite de 60 km/h. Tout va bien. Jumpy est en grande forme.
La descente est raide et j'attends le moment propice pour foncer.
Après plusieurs virages successifs et quelques courts tronçons rectilignes où j'ai tutoyé les 60 km/h, un long tronçon rectiligne annoncé à 11% se profile et s'ouvre devant moi. C'est le moment idéal, il n'y aura pas une 2ème occasion comme celle-ci.
Je scrute rapidement une dernière fois le vélo à la sortie du virage à 1315 m d'altitude. La mécanique tient bon: pas de bruits ni de vibrations suspects, les freins marchent bien, pas de fuite d'air....
Tout semble OK. Les indicateurs fournis par le compteur (vitesse, température, altitude, fréquence cardiaque, pente…) sont optimums.
Personne devant moi, aucune voiture en filature, la route est libre. Toutes les conditions sont réunies pour l'exploit. C'est le moment. Je lâche les freins en début de ligne droite et adopte une position aérodynamique pour réduire la traînée au maximum.
Je tient fermement le guidon et les poignées, les mains sur les freins au cas où et fonce vers l'inconnu en suivant la route d'un oeil très attentif. La vitesse augmente très rapidement: 50 km/h, puis 60 km/h.... Le vent de face augmente fortement au fur et à mesure que j'accélère. A 70 km/h, la vitesse continue d'augmenter, mais beaucoup plus lentement. Le vent de face est violent.
La vitesse finit par se stabiliser au bout de quelques secondes d'angoisse qui me paraissent interminables à
72,73 km/h. La limite a été atteinte.
Jumpy vient d'établir un nouveau record de vitesse dans la descente du Ventoux
Je n'ai pas le temps de savourer ce moment, car un virage en épingle est annoncé au bout de ce long alignement, je me redresse tout droit pour profiter du vent afin de casser rapidement ma vitesse, puis je commence à freiner et m'arrête après un long freinage musclé dans la courbe à 1171 m d'altitude pour calmer les chevaux et attendre le reste du groupe.
Les conditions étaient idéales: pas de sac à l'avant, une longue ligne suffisamment droite en pente de 11% et un vélo en parfait état de fonctionnement.
Sans le porte bidon que j'avais sur la potence et le sac Vaude pour l'outillage et les premiers soins, j'aurai pu encore augmenter légèrement cette vitesse, mais je pense qu'on atteint les limites avec le Brompton, notamment pour les roulements des roues.
Je ne regrette qu'une seule chose: l'oubli au QG du support de caméra pour filmer cette descente mémorable.
Lors de la descente du Grand Ballon dans la partie la plus raide et la plus rectiligne du parcours, le compteur était resté bloqué à 61,02 km/h en raison de la résistance au vent appliquée sur nos T-Bag fixés à l'avant qui nous freinaient considérablement et nous ont empêché d'aller plus vite.
Une fois arrêté, je contrôle à nouveau le vélo par sécurité. Tout est OK côté roulement et freins, la mécanique a parfaitement tenu le coup et la température des jantes chute rapidement pour atteindre une valeur acceptable.
Je suis particulièrement fier de ce vélo et de ce qu'il a accompli pour moi
Jumpy, mon fidèle destrier qui ne m'a jamais abandonné, a été particulièrement brave.
Aucune panne mécanique n'a été recensée, ni aucune crevaison durant ces 400 km effectués dans le Luberon.
Lors de l'ascension du mont Ventoux, outre son poids de 11,5 kg, les 1,5 L d'eau à portée de main dans les bidons nécessaires à l'ascension, il a transporté les 2 kg d'outillage nécessaires pour prodiguer les premières réparations en cas de casse mécanique et apporter les premiers soins d'urgence en cas de blessure du pilote ou d'un membre de l'équipe. Malgré l'assistance apportée par Pouille et son épouse, j'ai tenu à avoir sur moi le matériel nécessaire pour dépanner et soigner une éventuelle blessure le plus rapidement possible.
Il a fait preuve d'une fiabilité exemplaire en m'emmenant au sommet. Malgré 2 chutes à Avignon, il n'a jamais failli une seule fois et à fait preuve d'une robustesse extraordinaire.
Cette performance exceptionnelle, je la dois entre autre à un très bon niveau d'entretien et de soin apporté, mais aussi au choix pertinents du matériel et des composants soigneusement sélectionnés qui ont passé l'épreuve ultime avec brio.
Au travers de la victoire sur le Ventoux, ce vélo montre toute sa pertinence et sa force.
Il a quasiment atteint les 10 000 km
Même si les vélos de courses 2 fois plus légers et plus nerveux que Jumpy nous ont doublé dans la montée, il a mérité tout mon respect
Nous arrivons à Maulaucène au pied de la descente à 21h00 après une descente somptueuse et extraordinaire.
Un grand merci à Walmus et à sa famille qui nous ont ramené avec Pouille au campement en voiture et en camping car. Le dernier train partait de Carpentras à 19h52 et il n'y avait plus aucun bus pour nous ramener. En outre, personne de l'équipe n'était plus en mesure de rentrer en vélo jusqu'à l'Isle-sur-la-sorgue, les organismes étant à bout.
Nous arrivons complètement épuisés à notre QG au camping de la Sorguette, mais fiers de ce que nous avons accompli
Bravo à toute les participants pour cet exploit.
Nous avons effectués 63,6 km durant cette seule journée.
Vitesse moyenne: 10,68 km/h, temps de parcours: 5 heures et 57 minutes, vitesse max: 72,73 km/h, dénivelé positif: 1735 m, dénivelé négatif: 1570 m, 2151 kcal consommées.
Macadam